Histoires pour enfants

Ilyanna et la Poussière des Étoiles

Histoires pour enfants

Sur la Lune, Ilyanna, étrange enfant dotée d’une vive imagination mais réputée trop timide pour briller parmi les siens, doit pour la première fois quitter la sécurité du dôme lunaire. Sa mission : recueillir de précieux échantillons de poussière d’étoile, ingrédients essentiels à la protection de sa cité. Mais dehors, vrombissent dangers et mystères : un ogre légendaire traque la lumière, un diplomate alien au langage fleuri trouble les frontières, et l’invention d’un lanceur de sorts vire à l’imprévu. Ilyanna devra compter sur son courage, l’inattendu de ses alliés, et l’audace de rêver au-delà des cratères – car sur la Lune, ce que l’on croit n’est jamais ce qui est, et la poussière d’étoile cache plus d’un secret…
Ilyanna et la Poussière des Étoiles

Chapitre 2 : Dehors, à la Chasse aux Astres

Chapitre 2 : Le Labyrinthe de Cendre et de Lumière

Un souffle lunaire s’engouffrait dans la fissure ouverte du dôme. La porte massive s'était refermée derrière eux avec un déclic feutré, coupant net tout retour vers la Cité d’Argent. Devant, la surface de la Lune déroulait ses mystères – champs de cratères écorchés, dunes nacrées agitées d’une lumière tremblante, marches de pierre noire menant dans le ventre des ténèbres. Ilyanna, Vell et Noctis avançaient chacun à leur façon : Noctis, les traits tendus, faisait tournoyer son bâton au-dessus du sol, trop excité pour marcher droit ; Vell, quant à lui, semblait glisser comme un courant d’air, mutin, déjà à l’affût de la moindre curiosité.

Ilyanna, elle, gardait la tête baissée, le pas prudent. Chaque crissement sous ses bottes lui rappelait qu’ici, la moindre imprudence pouvait vous faire basculer dans un abîme d’oubli. Elle rangeait le traducteur portatif fourni par le Conseil, un petit galet argenté qui, selon les autres, ne servait à rien — qui voulait parler à des cailloux ou comprendre les ondes d’un écho ?

Vell, flairant l’objet dans sa main, lança soudain :

« Des traducteurs, on en avait tout un tiroir dans la souk-galaxie de mon enfance. J’ai appris à m’en servir pour comprendre les rumeurs du vent... Donne, je veux voir si celui-ci sait danser le martien ! »

Avant même qu’Ilyanna ne proteste, Vell fit pirouetter le galet entre ses longs doigts multicolores et appuya sur le cœur luminescent de l’objet. Le dispositif émit un bip lugubre puis... rien. Noctis ricana :

« À part traduire “erreur critique”, ce bidule ne sert qu’à ramasser la poussière, si tu veux mon avis. »

À cet instant précis, un grondement lointain éclata, comme si les montagnes elles-mêmes bâillaient de lassitude. Au-dessus d’eux, le ciel s’irisait de bandes électriques. Une tempête magnétique — rare mais spectaculaire — naissait à l’horizon, jetant dans leur sillage d’étranges ondes qui faisaient frémir la surface lunaire.

« Ce n’est pas bon, souffla Noctis soudain pâle. Les créatures du Coin d’Ombre raffolent des tempêtes : elles sortent chasser la phospho-poussière... et parfois les voyageurs. »

À peine ses mots prononcés, des ombres minuscules apparurent. Elles ne ressemblaient à rien de connu sur Terre : des boules moirées sur pattes arachnéennes, à la surface striée de filaments translucides ; des antennes fines comme des plumes, vibrant au moindre grésillement. D’abord une, puis dix, puis cent, elles entourèrent le trio, crépitant à grand renfort de sifflements et de projectiles étincelants — des éclats de poussière qu’elles ramassaient à la volée.

Vell, l’œil vif, lança alors solennellement :

« Messieurs-dames de la poussière et des ombres, je suis Vell, diplomate patenté du clan Noctule, grand amateur de négociations... et de poésies martiennes, à mes heures perdues ! »

Le traducteur dans sa main grésilla, puis traduisit leurs sifflements en une kyrielle de rimes absurdes :

« Qui vient troubler notre danse,
Muette tribu de l’effervescence ?
Sauras-tu capter notre langue
Ou seras-tu balayé par la tangue ? »

Noctis, en panique, voulut intervenir :

« Je peux lancer un sort de protection, ou peut-être générer un champ de force... »

Mais Vell, tout à son jeu d’ambassadeur intersidéral, dégaina une tirade improvisée :

« O créatures du crépuscule,
Accueillez trois errants minuscules,
Et prêtez-nous le fil brillant
Qui mène à l’étoile, fil d’argent ! »

Si la situation n’avait pas été si tendue, Ilyanna aurait éclaté de rire. L’effet fut pourtant spectaculaire : les petites créatures s’arrêtèrent, scrutèrent Vell de tous leurs yeux phosphorescents, puis commencèrent à chanter elles-mêmes. Une nuée de sons métalliques et de lumières tourbillonna autour du traducteur, qui transforma chaque trille en une phrase boiteuse mais compréhensible.

« Chantez, dansez, montrez-nous vos secrets ! Et nous vous guiderons à travers le dédale des cratères. »

Noctis, incapable de rester en place, n'écouta plus : il fit tournoyer son bâton et formula, sans réfléchir, une suite de syllabes mystérieuses. Aussitôt, une brume d’illusions s’abattit sur eux : le paysage oscilla, la Lune se morcela, des miroirs de poussière surgirent, déformant la réalité. La joyeuse tribu de créatures paniqua, tiraillée entre l’attraction du rêve et la crainte du désordre. Mais pire, au loin, un mugissement sourd leur parvint : l’écho, amplifié par la tempête, filait droit vers un massif cratère – celui qu’on disait habité par l’Ogre.

« Noctis ! siffla Ilyanna, reviens à toi — tu vas tous nous faire repérer ! »

Noctis, désarçonné, bidouilla son bâton frénétiquement. Après quelques étincelles et pierres qui giclaient, l’illusion cessa enfin. Tout le monde reprit souffle. Les créatures lunaires, rassurées, leur montrèrent une voie serpentine entre deux falaises, où la poussière volait par volutes entières, légère comme la brume d’un rêve.

Il leur fallut marcher longtemps, guidés par le chant hésitant de Vell (qui alternait proverbes lunaires et charades martiennes) et la lueur vacillante du traducteur. Noctis, penaud, se contenta de surveiller l’arrière, l'air de vouloir se rendre invisible à la moindre bourde.

Bientôt, ils parvinrent au pied d’un pilier naturel, une aiguille de roche blanche qui touchait presque le ciel lunaire. Tout en haut, une clarté étrange tremblait, comme si une étoile s’était empêtrée dans la pierre.

« C’est notre premier gisement, dit Noctis à voix basse. Mais l’ascension… ce n’est pas du tout dans mes cordes. »

Ilyanna déglutit. La colonne semblait flotter dans l’immensité grise, vertigineuse, trop fine pour quiconque d’autre qu’un rêveur – ou un funambule. Mais déjà, une nuée de prédateurs scintillants, serpentins et vaporeux, se glissaient hors des grottes voisines, attirés par la vibration magique de la poussière d’étoile.

Vell tapota l’épaule d’Ilyanna :

« C’est le genre d’obstacle qui fait briller les héros. Tu ne montres pas forcément tes forces au grand jour… mais tu les as, je parie mon œil turquoise là-dessus. »

Noctis, lui, ajusta son collier protecteur et se mit à faire la roue, l’air à la fois ridicule et étrangement rassurant, pendant que Vell haranguait les prédateurs en citant un proverbe sonique du clan Noctule sur la supériorité du chant sur la chasse. Leur manège détourna en effet l’attention de la nuée, mais Ilyanna, elle, n’avait d’autre choix que de grimper.

Elle posa la paume sur la roche froide. Son cœur battait si fort qu’elle en oublia le paysage. À chaque pas, elle se récitait en silence un de ses contes, imaginant que chaque prise était un mot doux, chaque fissure une aventure, chaque vertige un passage vers la lumière. Arrivée au sommet, elle vit, blottie dans une anfractuosité, une masse de poussière pure, lumineuse et mouvante.

Dès qu’Ilyanna approcha la fiole de cristal, la poussière frémit, comme vivante. Elle hésita, puis, à voix basse, récita l’un de ses poèmes, celui qu’elle gardait pour les jours de doute :

« Poussière d’étoile, éclat mystérieux,
Viens danser dans la paume de mes vœux.
Si tu entends battre mon rêve léger,
Saurais-tu, toi aussi, t’envoler ? »

La poussière sembla alors vibrer, déployant de minuscules filaments scintillants qui tressèrent autour d’Ilyanna une auréole douce. Elle se sentit transportée, comme si la Lune elle-même lui répondait. D’un geste sûr, elle recueillit l’échantillon.

En bas, Vell et Noctis brandirent leurs bras, acclamant à grand bruit :

« Voilà une héritière des étoiles ! »

Ilyanna, tremblante mais fière, amorça la descente. Elle n’était plus tout à fait la même : dans sa main, la poussière vivante battait au rythme de son cœur, et dans son regard, l’ombre du doute laissait place à une flamme indomptable.

Mais des ombres plus grandes les suivaient, et il restait tant de secrets sous le voile pâle du clair de Lune…



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